Entrée en vigueur de la loi C-13
Auteure: Catherine Paquin-Veillette, Étudiante au cours de DRT6929E
Le 9 mars 2015 entrait en vigueur la Loi C-13 intitulée Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur la concurrence et la Loi sur l’entraide juridique en matière criminelle. Le gouvernement a tout d’abord introduit cette loi avec le louable objectif de protéger les citoyens contre la cyberintimidation. En effet, une nouvelle infraction est dorénavant ajoutée au Code Criminel, criminalisant la distribution non consensuelle d’images intimes. Or, cette loi – de plus de quarante pages – est constituée majoritairement de dispositions qui ont été perçues par plusieurs académiciens (voir notamment: Gautrais et Geist) comme favorisant un élargissement important des pouvoirs conférés aux autorités pour enfreindre le droit à la vie privée des Canadiens.
Plusieurs ont soulevé la similitude entre la loi C-13 et le défunt projet de loi C-30. Le gouvernement avait introduit ce projet de loi en le liant à la lutte à la pornographie juvénile. Or, plusieurs de ses dispositions avaient causées une vaste contestation populaire vu leur faute de respecter certains droits fondamentaux. Le Parlement n’avait eu d’autres choix que de reléguer C-30 aux oubliettes.
Enjeux relatifs à la vie privée
Les principaux enjeux relatifs à la vie privée dans la loi C-13, soulevés notamment par le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada sont les suivants :
- Les seuils applicables à l’exercice des nouveaux pouvoirs et à l’utilisation des nouvelles procédures;
- L’éventail de ministères, d’organismes et de fonctionnaires qui peuvent exercer ces nouveaux pouvoirs;
- La transparence et le cadre de responsabilisation régissant l’exercice de ces pouvoirs;
- Le besoin de clarté juridique concernant les demandes sans mandat, la communication volontaire et l’immunité juridique.
La Cour Suprême du Canada indiquait en juin dernier dans l’arrêt R c. Spencer que le droit à la vie privée en ligne comprend la possibilité d’utiliser internet de façon anonyme et que les utilisateurs peuvent avoir une attente raisonnable en matière de vie privée au sujet de leurs données d’abonnés. Ainsi, on peut s’inquiéter que la loi puisse être annulée dans son ensemble si elle était déboutée en cour en raison de l’inconstitutionnalité de son empiètement sur la vie privée.
Réactions mitigées
Le Commissaire à la protection de la vie privée, Daniel Therrien, n’était pas convaincu du bien fondé des dispositions de C-13 :
[…] it is important to remember that these new investigative tools would sweep up vast amounts of personal information by an open-ended group of ‘public officers’ for a wide range of much less compelling purposes than the fight against cyberbullying.
La mère d’Amanda Todd, une des victimes de la cyberintimidation, indiquait quant à elle :
Je ne veux pas que nos enfants soient de nouveau victimes en perdant leur droit à la vie privée. Je suis troublée par certaines dispositions donnant le feu vert au partage d’informations personnelles de Canadiens sans processus judiciaire normal.
Malgré ces inquiétudes soulevées, le ministre de la justice, Peter Mackay, continue de défendre la constitutionnalité et le bien fondé de la Loi C-13. Il restera à voir comment cette loi sera appliquée en pratique et si les enjeux soulevés se trouvent à être bien fondés ou non.
This content has been updated on April 30, 2015 at 22 h 07 min.