Loi canadienne anti-pourriel: une première entreprise sanctionnée
Auteure: Isabel Poirier Étudiante au cours de DRT6929E
Par communiqué officiel émis le 5 mars au matin, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) annonçait avoir émis un procès-verbal de quatre violations à la Loi canadienne anti-pourriel (la «Loi») à l’entreprise québécoise Compu-Finder.
Selon le communiqué, l’enquête du CRTC a révélé que l’entreprise enfreignait «de façon flagrante les principes de base de la Loi». En effet, l’entreprise aurait contrevenu à l’interdiction d’envoyer des messages électroniques commerciaux sans avoir obtenu au préalable le consentement des destinataires (article 6(1)a) de la Loi).
L’entreprise aurait également envoyé des «courriels pour lesquels les mécanismes de désabonnement ne fonctionnaient pas correctement». Plus précisément, La Presse Canadienne, dans un article publié par Ici Radio-Canada.ca, ajoute que l’entreprise aurait omis d’honorer les demandes de désabonnement qu’elle recevait. Dans cet article, Mme Manon Bombardier, cadre en chef de la Conformité et des Enquêtes au CRTC, explique, en parlant de Compu-Finder, qu’ «Ils n’ont fait aucun effort pour modifier leurs pratiques […] Les gens se désabonnaient et continuaient quand même de recevoir des courriels, et certains ont même fait des efforts additionnels pour joindre la compagnie et leur dire : ”Je me suis désabonné, je reçois encore des courriels”, et malgré tout, ils continuaient d’en recevoir. ». En effet, cela constitue un manquement à l’article 11(3) de la Loi qui prévoit expressément que les demandes d’exclusions/retrait de consentement doivent être traitées dans un délai maximal de dix jours ouvrables, sans autre intervention de la part de la personne qui demande à ne plus recevoir de messages électroniques commerciaux.
Faits intéressants : Le CRTC précise que l’entreprise avait fait l’objet du quart des plaintes déposées auprès du Centre de notification des pourriels depuis l’entrée en vigueur de la Loi en juillet 2014, soit un total de plus de 245 000 plaintes. Par ailleurs, Mme Bombardier précise que «l’entreprise avait été avisée de l’enquête du CRTC et avait eu l’occasion de se soumettre à la loi.». On comprend donc que le CRTC, qui reçoit environ 1000 plaintes par jour, ait pu prioriser cette enquête.
Ainsi, ayant des motifs raisonnables de croire à une violation des dispositions de la Loi aux termes de son enquête, le CRTC, pouvait dès lors signifier à son auteur présumé un procès-verbal de violation (article 22(1) de la Loi) et juger bon d’imposer une sanction administrative pécuniaire pour l’inciter au respect de la Loi (article 20(1)et(2) de la Loi). La Loi fixe le plafond d’une telle amende à 10M$ dans le cas d’une personne morale (article de la 20(4) de la Loi) et est déterminée selon la gravité et le contexte de la violation (critères détaillés à l’article 20(3) de la Loi). Dans le cas de Compu-Finder, l’amende a été fixée à 1,1M$, constituant ainsi la première amende imposée par le CRTC pour une violation à la Loi depuis son entrée en vigueur, la dernière enquête du CRTC ayant été communiquée publiquement le 7 octobre 2014 n’ayant pas donné lieu à une sanction eu égard aux circonstances de l’affaire.
Selon le communiqué du 5 mars du CRTC, Compu-Finder dispose donc de 30 jours pour payer l’amende ou pour présenter ses observations (article 24 de la Loi) selon ce qui lui a été demandé dans le procès-verbal. Par la suite, le CRTC «décide[ra], selon la prépondérance des probabilités, de sa responsabilité à l’égard de la violation et, le cas échéant, il [pourra] imposer la sanction prévue dans le procès-verbal, en réduire le montant, y renoncer ou encore en suspendre le paiement aux conditions qu’il estime[ra] nécessaires pour l’observation de la présente loi.» (article 25(1) de la Loi). Compu-Finder aurait également une troisième option, soit celle de contracter un engagement, ce qui mettrait fin à la procédure en violation (article 21(4) de la Loi). À noter également que le paiement sans présentation d’observations, tout comme l’omission de présenter des observations et de payer, valent déclaration de responsabilité (articles 22(2)e) et 24(2) de la Loi) et Compu-Finder devrait alors payer l’amende fixée par le CRTC.
Voici donc une première sanction officielle imposée par la cadre en chef de la Conformité et des Enquêtes du CRTC, laquelle déclarait hier : «Nous prenons la question de la non-conformité à la Loi très au sérieux, et nous nous attendons à ce que toutes les entreprises se conforment à la Loi.»
This content has been updated on March 6, 2015 at 19 h 38 min.